La production de contenus dans les bibliothèques

Quelques notes prises lors de l’après-midi co-organisé la BPI et le BBF sur le thème de la production de contenus. La demi-journée était animée par le pétillant Yves Desrichard.
Il peut rester des erreurs ou des imprécisions dans ces notes prises sur le vif : les commentaires sont là pour que vous me le signaliez si besoin !
Introduction, par Patrick Bazin, directeur de la Bpi
Patrick Bazin a  indiqué qu’il avait déjà donné une conférence à Taiwan dans les années 2000 sur la bibliothèque productrice de contenus. Dans le reste du monde, le sujet semble être naturel et évident. Ici, dans certaines bibliothèques françaises, il peut susciter des réactions certes normales mais encore assez vives. Lorsque les bibliothécaires essaient de penser ce qu’ils font, ils prennent parfois de la distance avec le sujet.
Aujourd’hui, la pratique de production de contenus comme la pratique culturelle est déjà développée dans les bibliothèques dynamiques. La question de la production de contenus dans les bibliothèques ne peut pas être traitée en partant de la bibliothèque : il faut certes rattacher les activités de production de contenus à nos établissements mais aussi prendre du recul et voir qu’ils sont insérés dans un contexte. Les bibliothèques ne sont ni des bulles, ni des îles : en décentrant notre regard, nous pouvons produire des contenus (plutôt que de partir du catalogue…).
PB  parlait de l’ordre (organisation, strates qui se superposent) du livre en reprenant les propos de Roger Chartier, il préfère maintenant le terme d’écosystème qui lui semble plus approprié (cf. Silvère Mercier).
L’écosystème du livre était basé sur l’accumulation et l’organisation de savoirs constitués, dont les livres et d’autres supports sont les véhicules et les réceptacles. La notion de savoirs constitués est primordiale : la bibliothèque qui fonctionne sur cette organisation suppose une prédétermination par une grille de classement de ces savoirs. Cette prédétermination a toujours évolué en fonction des usages.
Une séparation radicale entre les contenus et les outils, entre les livres et les catalogues a longtemps eu cours. Pourtant, on n’a pas attendu la révolution numérique pour savoir qu’il y a une rétroaction des outils sur les contenus. Le livre lui-même porte avec lui sa technologie qui influe sur le contenu (Henri-Jean Martin).
Cette porosité outil/contenu est devenue aujourd’hui un vrai phénomène culturel qui porte un nouveau paradigme. La mutation que nous vivons maintenant est une mutation de déplacement des centres d’intérêt des professionnels de la culture. Rien de nouveau sous le soleil, nous avons les mêmes ingrédients à gérer : ce qui change, ce sont les frontières, d’où l’importance du concept de médiation. Aujourd’hui tout semble se situer dans les interfaces.
La perception de l’usager est désormais un peu comme une tête de lecture de magnétoscope ou d’ordinateur. Il s’agit du principe régulateur d’un individu souverain qui n’utilise le savoir du bibliothécaire que comme moyen neutre pour accéder aux contenus qui l’intéressent, d’où l’importance extrême de la notion de neutralité. C’est un modèle puissant avec une dimension politique : nous sommes tous attachés à l’accès libre et gratuit des usagers et à l’égalité de leur accès.
Fondamentalement, une bibliothèque au sens classique est caractérisée par l’absence de médiation. Toutes les autres institutions (théâtre, musée, …) se doivent de faire de la médiation. Un théâtre ne peut pas se permettre, par exemple, de rejouer la même pièce sans apporter une lecture nouvelle.
Nous, les bibliothécaires, sommes dans un retrait idéologique, éthique. Le problème, car c’en est un, c’est que le contexte, l’écosystème est en train de changer. S’il change, le paradoxe est qu’il n’annule pas l’écosystème précédent : il l’encapsule et procède plutôt d’une hiérarchie enchevêtrée. Le modèle de l’usager libre reste dans ce nouvel écosystème un principe régulateur, même si d’autres éléments sont venus reconfigurer l’ensemble dans lequel nous sommes immergés.
Quelques causes de ce changement :
– démocratisation des années 1960/70 avec la démocratie culturelle : d’avantage individus se sont pensés comme des acteurs du champ culturel,
– mondialisation : diversité culturelle et de point de vue. Nous étions dans la diversité des idées, aujourd’hui nous sommes dans la diversité des cultures. L’universel et le partage doivent désormais se repenser en fonction de la diversité liée à la mondialisation,
– révolution numérique.
Les bibliothèques ont par exemple une vision périmée de la science, dont les rayons évoluent peu. La science a fonctionné sur le mode de l’in vitro mais cette vision d’une science de laboratoire est aujourd’hui enrichie par une prise en compte de la complexité des phénomènes. Les sciences sont obligées d’avoir une approche pluraliste et interdisciplinaire. Les bibliothèques doivent s’adapter à ce changement et avoir une vision plus actuelle de la science elle-même.
Nous assistons à une mutation du champ culturel, avec une reconfiguration des textes et des données qui nous sont offertes : le savoir devient dynamique, les données sont fragmentées par l’hypertexte. On peut désormais partager ses connaissances avec d’autres dans une interaction permanente. Le savoir a acquis une dimension pratique qui rejoint l’artisanat. Nous sommes dans un continuum du savoir : toutes les activités et les étapes de la vie s’intègrent dans un parcours de connaissance.
Depuis quelques années, il s’est produit une dissémination générale des outils bibliothéconomiques : nous n’avons plus le leadership des outils permettant de travailler sur les contenus. Tout un chacun peut s’emparer à son niveau des outils d’accès à l’information. C’est une révolution qui s’inscrit au chapitre de la démocratie culturelle.
Tous ces éléments expliquent l’importance de la médiation : la médiation joue sur le passage d’un registre à l’autre. C’est une pratique de l’entre-deux qui se répand aujourd’hui dans tous les domaines de la connaissance.
L’univers de la bibliothèque qui se dessine est construit selon une structure à quatre axes :
– dimension de la réponse à la demande : axe autour duquel se réorganisent nos stratégies de rapports au public. L’axe de la demande à l’époque de la nouvelle technologie de la connaissance implique que le rapport à l’usager s’inscrive dans un accompagnement. Cet accompagnement doit faire aussi l’objet d’une capitalisation. La bibliothèque doit faire en sorte que la réponse soit un mélange entre le contenu et la façon d’accéder à ce contenu. La réponse doit être un contenu intermédiaire où contenus et outils soient délivrés aux publics de façon pédagogique ;
– axe de l’offre : continuer à s’inscrire dans l’offre. La bibliothèque ne doit pas répondre uniquement aux attentes, elle doit construire une offre en fonction des lignes de force de l’environnement et en fonction de son public. La bibliothèque doit s’efforcer d’être au diapason de ce qui se dit, de ce qui se pense, de ce qui s’échange dans l’écosystème dans lequel elle est immergée. Le bibliothécaire doit être lui-même plongé dans l’environnement qui l’entoure et le maîtriser (La bibliothèque est trop souvent coupée de son environnement – BPI versus centre Pompidou, BML versus théâtres, etc ;
– intégration d’une pratique : articulation entre les différents registres de la connaissance. On ne peut plus être utile au public si on ne lui offre pas la possibilité de connaître mais aussi de pratiquer (autoformation, ateliers) ;
-axe de la communauté : on ne pense pas seul. Les usagers font partie d’une communauté. La neutralité qui est un principe régulateur auquel il faut absolument tenir et qui est en même temps impossible à tenir. Dans les années 60/70, pas de médiation, les gens lettrés venaient fort de leur propre communauté, leur propre médiation. Aujourd’hui la bibliothèque doit créer des communautés.
La bibliothèque doit se penser comme un processus dynamique en interaction avec son environnement.
PB reste sceptique par rapport à la bibliothèque troisième lieu : croire que l’avenir est dans l’aménagement d’un lieu paraît un peu court. Il faut continuer à croire à la fonction cognitive des bibliothèques : nous avons un rôle dans la transmission des connaissances. Il faut savoir situer notre action dans cette transmission.
La production de contenus prend son sens dans ce contexte : les frontières sont de plus en plus floues et les contenus/outils subissent une intrication. Les bibliothèque peuvent s’inscrire dans ce cadre. Les bibliothécaires sont compétents et convaincants dans la production de contenus mais plusieurs siècles de retrait ont fait que nous nous sous-estimons, cela alors que nous sommes de vrais intermédiaires de la connaissance.
Table ronde : valorisations des contenus en bibliothèque
Guy Cobolet, directeur de la BIUM, Bibliothèque Interuniversitaire de Médecine

« Histoire de la santé et contenus électroniques »

Dans son article, GC a traité de la façon dont on produit des contenus, il a axé son intervention sur la cause de leur production.
La BIUM produit des bases de textes en ligne, des bases d’images et des expositions virtuelles. Ce sont des produits hybrides, souvent accompagnés par des notices de chercheurs et de spécialistes du domaine.
Pourquoi ? Un constat : on est de plus en plus des techniciens chargés des RH, des finances, des négociations avec les éditeurs (discussions de marchands de tapis avec un commercial qui ignore souvent le contenu du bouquet qu’il vend, tandis que le bibliothécaire l’ignore aussi). Dans ce cadre, on ne parle plus jamais de contenus, ni de diffusion culturelle.
On est devenu tellement technicien qu’on n’est peut-être pas les meilleurs pour ces tâches : faut-il être bibliothécaire pour acheter des bouquets de revues et le mettre en ligne ? Pour acheter, il faut un décideur, un chéquier et quelqu’un qui gère l’accès au site.
On est même tellement technicien et gestionnaire que certaines autorités envisagent de changer nos statuts et nous donner des emplois fonctionnels (comme les agents comptables, les secrétaires généraux).
La bibliothèque est un tuyau de transmission qui devient de plus en plus invisible : par la production de contenus, il s’agit de faire en sorte que la bibliothèque ne soit pas un couloir que l’on traverse sans s’en rendre compte. Il faut que la bibliothèque soit la pièce au bout du couloir où on va chercher la ressource.
La production de contenus est un moyen de réaffirmer notre statut scientifique. Tous nos prédécesseurs ont produit de très grands catalogues, de très grandes bibliographies et d’autres outils que tout le monde utilise encore. Si l’on se désintéresse du savoir et de sa transmission, si on ne s’intéresse qu’aux techniques, notre métier et notre avenir sont condamnés. Si nous sommes des bibliothèques de recherche, nous devons investir ce champ-là.
YD : on s’intéresse aux contenus, mais on n’est pas pour autant spécialiste ?
GC : effectivement, on ne l’est pas. Toutefois, on ne peut pas choisir les contenants correctement sans maîtriser un tant soit peu les contenus. Si nous voulons que les bibliothèques aient encore un champ d’action et une finalité, nous devons réinvestir certains champs délaissés depuis trop longtemps.
Annaig Mahé, maître de conférences et coresponsable de l’unité régionale de formation à l’information scientifique et technique à l’Urfist de Paris 

« Bibliothèques et archives ouvertes »

Part importante prise par les bibliothèques dans les archives ouvertes.
Les bibliothèques ont toujours été contributeurs actifs et naturels de ce mouvement. Pourquoi ? Parce qu’elles ont toujours été attachées au principe du libre accès ; parce que depuis quelques années les budgets ont drastiquement baissé ; ensuite parce que les bibliothèques sont un point d’entrée de l’information scientifique et technique, qu’elles sont bien placées pour faire le lien entre les différents partenaires (chercheurs et institutions) ; enfin parce que les bib ont un positionnement stratégique en développant des compétences innovantes concernant des contenus classiques.
Internet archive fête ses 20 ans. Il s’agissait pour ce projet de permettre un accès libre à l’information scientifique sans restriction de cet accès. Il a été développé localement par les chercheurs qui avaient comme but d’utiliser les nouvelles technologies du réseau afin d’améliorer la diffusion directe de l’info scientifique dans leur communauté : mettre à disposition les carnets de recherche, par exemple. Cela a été l’occasion d’un bras de fer entre chercheurs et sociétés savantes.
Pour les bibliothèques, il faut trouver désormais trouver des alternatives face aux difficultés budgétaires croissantes. Les autres enjeux des archives ouvertes sont notamment l’évaluation de la production scientifique qui ne sont pas toujours en accord avec la valorisation de l’information.
Face aux enjeux de la négociation commerciale, mais aussi aux évolutions institutionnelles et scientifiques, les bibliothèques n’ont pas toujours les moyens de travailler. Elles peuvent pourtant avoir un rôle majeur de réflexion et d’accompagnement dans ce cadre.
Trois rôles traditionnel des bibliothèques : acquisition, archivage, passerelle. Un 4e rôle aujourd’hui : publication.
Réserve de Guy Cobolet : dans les archives ouvertes, les bibliothèques ont le rôle dont personne ne veut, celui des petites mains qui ajoutent les métadonnées (nouveau nom du catalogage !).
Question du dépôt obligatoire :
AM : les organismes financeurs de la recherche ont décidé que la contrepartie à leur financement était le libre accès au résultat de la recherche. On parle d’obligation mais aucune sanction n’existe à l’heure actuelle.
GC : aux Etats-Unis, toute recherche publique doit être publiée dans une archive ouverte six mois après la parution dans un périodique. Si ce n’est pas fait, l’organisme public ne finance plus. Ça marche très bien.
Emanuèle Payen, chef du service Action culturelle de la Bpi

« Action culturelle et production de contenus »

Le service de l’animation à la BPI est né en même temps que la BPI. A l’époque, c’était un service innovant, pionnier dans son genre. La BPI organise aujourd’hui entre cinquante et soixante événements par an et sept mille personnes sont venues assister aux manifestations.
Ce service a accompagné l’évolution de la bibliothèque des années 1970, c’est un nouveau mode d’accès au savoir, avec de nouvelles formes de convivialité. La mission de médiation s’est notamment nourrie ses trente dernières années de l’action des musées.
Les enquêtes de ces dernières années montrent que l’action culturelle a été peu à peu légitimée, y compris dans les SCD. C’est un constat plutôt satisfaisant même si perdure la difficulté de trouver des articulations propres par rapport aux missions de l’institution et de trouver une vraie visibilité (sans compter la cherté du budget).
Il existe encore des difficultés ressenties par les établissements à articuler l’action culturelle aux autres initiatives de la bibliothèque (développement documentaire, coopération, services, contenus web).
L’action culturelle rend compte de la diversité des collections et elle permet une actualisation des connaissances. La médiation permet de servir un contenu mais aussi d’en amender le sens grâce aux contributions de l’usager. La médiation modifie à la fois l’émetteur et le récepteur.
La charte d’action culturelle cadre les actions menées.
Par l’action culturelle, l’idée de proposer au public des outils de discernement. Il s’agit de faire de la bibliothèque une institution vivante qui ait le souci du pluralisme et du sens critique, tout en réconciliant le temps de la collection et celui de l’événement.
David-Georges Picard, conservateur à la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg

« Constituer une bibliothèque, constituer des savoirs »

Comment la collection en elle-même peut-elle être productrice de savoir ou proposer un accès à ce savoir ? La mission première du bibliothécaire est la lutte contre l’hyper spécialisation. La bibliothèque est une institution agissante. Elle est une passerelle public/savoirs, mais aussi une passerelle entre les publics eux-mêmes.
L’organisation topographique de la collection témoigne de l’évolution des pratiques de lecture. La classification est déjà une forme de médiation. Une mauvaise organisation peut aussi neutraliser le savoir. Le bibliothécaire en rapprochant les sources va permettre la production du savoir. Le numérique permet de dépasser les limites de classification.
La BNUS utilise l’adaptation d’une classification allemande. Celle-ci permet de faire une recherche d’un point de vue dialectique : on accède à un document en le comprenant dans un ensemble global et vaste du savoir. Cette classification permet des rapprochements intéressants entre les documents et elle a même permis de susciter des recherches particulières à l’université. Cela n’est pas sans obstacles intellectuels, puisque nos classifications sont le reflet de nos schémas de pensée actuels.
Le développement des bibliothèques numériques est une continuité virtuelle de cette approche intellectuelle : il s’agit de connecter des collections dans la transversalité.
Christian Ruby, docteur en philosophie, enseignant
« Les bibliothèques ne sont pas des îles ! Sur un futur archipel du lisible, du visible et du dicible. »
CR se définit comme un très gros consommateur des bibliothèques publiques.
Crise ou pas crise des institutions ? Il ne faut pas croire qu’une institution passe d’un état paradisiaque à une crise : les institutions sont toujours en crise.
Chaque institution a été conçue pour elle-même comme une institution totale. Elle doit se repenser dans des liens avec les autres.
La bibliothèque comme institution du lisible : la fonction bibliothèque dessine implicitement un ensemble beaucoup plus complexe. Sa fonction n’est guère monolithique.
Chaque institution se croit dépositaire d’une de ces notions : lisible (bibliothèque), visible (musée) et audible (théâtre). Chaque institution est pourtant débordée par l’autre. On pourrait favoriser des redéploiements. Il faut sortir de la croyance en une distribution naturelle des trois notions : lisible, dicible, visible. Les trois doivent s’articuler.
CR approuve les propos d’André Schiffrin (Les livres et l’argent, La fabrique) : les bibliothèques et les livres sont infiniment plus menacés par la mondialisation et par les conglomérats d’éditeurs que par les ordinateurs.
C’est à la philosophie des Lumières que les institutions d’aujourd’hui doivent leur fonctionnement. C’est une médiation qui s’inquiétait des individus et pas des relations entre les individus, c’est une culture unique, uniforme et européano-centrée.
Il faut penser aujourd’hui les valeurs culturelles selon un autre paradigme : la culture de soi. Au lieu de parler de la culture en tant qu’objet et de référence, il faut en parler en tant que trajectoire et exercice. C’est un passage pour aller vers autre chose : l’usager de la bibliothèque, le spectateur au théâtre n’est pas un « être » (dans le sens d’« être » spectateur) mais au contraire une trajectoire d’une œuvre à une autre. Il faut reconstruire de l’ouverture.
On ne naît pas lecteur, on ne naît pas spectateur, on le devient. On le redevient même à chaque livre, à chaque spectacle. On se recompose après chaque événement lu et vu. C’est sur ces trajectoires de lecteurs, de spectateurs qu’on devrait se concentrer dans les politiques culturelles.
Il faut faire des exercices : passer de « la culture » à « se cultiver » ; permettre de jouer et créer des distances et des distorsions (déprise de soi pour aller vers les autres) ; ne jamais définir la culture en un objet fini, figé : c’est un perpétuel recommencement. Il ne faut pas avoir d’idéal de culture mais sans cesse des confrontations qui sont la culture même.
Ne rien faire aujourd’hui est la pire des positions, qui revient à laisser faire le marché. Tomber dans la nostalgie est aussi dramatique (nous ne devons pas assigner leur futur aux jeunes générations : ne pas transmettre, mais prendre à bras le corps le problème de la formation des jeunes générations).
Parmi toutes nos difficultés, il existe un trait commun : penser la culture comme une dynamique, une trajectoire et un exercice et cesser de croire qu’il faut fabriquer des sanctuaires.
Table ronde : bibliothèques, archives, musées, le temps des confluences ?
Agnès Camus-Vigue, sociologue au Service Etudes et recherches, Bpi
Présentation des résultats d’une enquête menée récemment
L’enquête consistait à interroger le public des conférences de la BPI sur ses motivations.
Bibliothèque : de la conservation à la conversation.
Le savoir peut circuler via les conférences qui sont données de vive voix. Les conférences sont à la confluence du savoir et du plaisir.
Il existe un lien entre savoir et plaisir, sur lequel on n’insiste pas assez : un plaisir qui renvoie à l’oralité, au visuel et à l’auditif. C’est une expérience marquante du verbe, positive, qui va s’agrémenter du savoir.
C’est la volonté d’un savoir à conquérir qui anime le public des conférences.
Félicie Contenot, chargée de la documentation au domaine de Chantilly

« La médiation au service de la confluence du musée et de la bibliothèque »

La médiation peut se définir comme la confluence des pratiques en musée et en bibliothèque. Il s’agit de faire converger des services transversaux comme les services en ligne, l’accompagnement des publics.
La médiation est une confluence entre un lieu, ce contenant qu’est le musée/la bibliothèque, un contenu : objet d’art/livre et l’usager.
Objectifs : mettre en valeur des collections, accompagner les publics, éduquer de manière informelle, faire partager des savoirs.
Plusieurs contraintes : les attentes des utilisateurs qui sont des publics spécialisés du musée ou de la bibliothèque implique de construire une offre qui conçoive des médiations adaptées au public. Le lieu impose aussi ses contraintes : les codes sont différents d’un espace à l’autre et nécessitent un apprentissage des codes : silence en bibliothèque, interdiction de toucher au musée. Il faut également prendre en compte la géographie du lieu (adapter le parcours de visite aux espaces) et les divergences de fonctionnement (les procédures d’accès qui diffèrent par exemple) et d’horaires.
Plusieurs types de médiation existent : la médiation directe, in situ : exploiter des thèmes communs, expliquer les missions des lieux ; la médiation indirecte : médiation par le support (documents écrits sur place, cartels, expo, médiation numérique sur place). Son objectif est la mise en valeur des collections non exposées et l’offre de contenus complémentaires.
La médiation indirecte, à distance, est tout aussi importante : elle passe par les sites internet (portail), les applications mobiles, etc. Ce sont des contenus accessibles 24/24 qui participent au rayonnement du patrimoine.
Il s’agit de promouvoir une démarche en synergie : assurer une représentation équitable des entités, disposer d’objectifs communs et avoir un dispositif commun.
Joël Daire, directeur du patrimoine de la Cinémathèque française

« Collections, savoirs et savoir-faire à la Cinémathèque française »

JD a ouvert son intervention par une réponse à CR qui avait dit refuser la transmission, pour ne conserver que la formation. Pour JD, si Henri Langlois n’avait pas cru à la transmission, la cinémathèque ne serait pas là aujourd’hui. A l’époque, le cinéma était en train de disparaître et il a permis de conserver des milliers d’œuvres. S’il n’y a pas de transmission, c’est un autodafé.
La cinémathèque est à la fois lieu d’expo, de conservation des films (archive), un musée et une bibliohtèque.
Langlois et ses collaborateurs ont collecté les films et tout ce qui concernait le cinéma (affiches, costumes, etc.). Aujourd’hui, la cinémathèque doit actualiser les volontés de Langlois : il lui faut réinventer le lieu.
Sa vocation première est d’être un lieu de médiation entre le cinéma d’un côté et les cinéphiles de l’autre. Elle a toujours eu des publics agissants, dont certains sont devenus cinéastes comme Truffaut, Chabrol.
Le temps du public captif aujourd’hui est révolu : le cinéma est partout, au Louvre, sur les chaînes de télévision et sur les portables. L’accès au cinéma est devenu plus facile.
Dans ce contexte, comment continuer à maintenir du sens à la cinémathèque ? Il faut continuer à donner aux cinéphiles la possibilité de venir se former la cinémathèque.
L’offre doit trouver son sens à un moment de doute général sur les institutions culturelles et dans le cadre de la révolution numérique. Le numérique peut être un formidable outil. Exemple : le film muet n’a jamais été vraiment muet (orchestres, etc). Le numérique peut aider à recréer les conditions du muet de l’époque.
Le numérique permet aussi de donner accès à des collections difficilement consultables.
Enfin, il vaut veiller à garder, à organiser la conservation des traces de cette médiation que nous faisons au quotidien et qui vient elle aussi enrichir nos collections. Nous produisons tous des contenus sur nos collections mais nous n’avons pas encore eu l’idée de conserver nos propres traces.
Esther de Climmer, directrice de la médiathèque de Roubaix

« La bibliothèque numérique de Roubaix et autres collaborations »

La bibliothèque numérique de Roubaix réunit les collections numérisées de la bibliothèque municipale, des archives et du musée. C’est un véritable rassemblement des équipements culturels existant à Roubaix.